La trajectoire des relations sino-russes joue un rôle important dans le développement économique et la sécurité de l’Asie centrale. C’est également un facteur de réussite de la mise en œuvre de la BRI, qui vise à renforcer la coopération régionale et la connectivité. De la même manière, les cinq républiques ressentent la pression de leur dépendance accrue au duopole russo-chinois, en particulier leur dépendance économique à Pékin. Cet argument est lié au récit du Grand Jeu, qui se concentre sur la rivalité des grandes puissances dans la région. Cependant, la dépendance de la région à l’égard de la Russie et de la Chine ne doit pas être surestimée. Plusieurs développements remettent en question l’idée que les pays d’Asie centrale sont des pions passifs dans cette rivalité.

Premièrement, la Russie et la Chine ne sont pas les seuls acteurs en Asie centrale. Depuis l’effondrement de l’URSS, d’autres États ont pu marquer leur présence dans la région. Par exemple, l’Iran et la Turquie, guidés par des opportunités économiques, des intérêts stratégiques et des liens culturels solides avec l’Asie centrale, sont impliqués dans leur propre compétition d’influence. Pendant ce temps, l’UE reste l’un des partenaires commerciaux et d’investissement les plus importants des pays d’Asie centrale. La Corée du Sud entretient également de bonnes relations diplomatiques et économiques avec la région. Séoul cherche à poursuivre les investissements dans les secteurs de haute technologie de l’économie de la région. L’importance géostratégique de l’Asie centrale attire également le Pakistan et l’Inde, les deux pays étant devenus membres à part entière de l’OCS. Ces dynamiques sous-régionales donnent aux États d’Asie centrale suffisamment de latitude pour mener une politique étrangère indépendante.

Deuxièmement, la dépendance économique de l’Asie centrale vis-à-vis de Pékin est souvent liée à des emprunts à grande échelle de la Chine pour financer des projets d’infrastructure. Cela est particulièrement vrai du Kirghizistan et du Tadjikistan, qui ont été laissés à un risque élevé de surendettement. Pourtant, l’argument du piège de la dette chinoise a été largement exagéré. Avant le COVID-19, les deux pays respectaient leurs obligations de remboursement envers la Chine. En outre, l’Asie centrale le commerce international comprend de nombreux partenaires extrarégionaux, qui importent souvent plus de marchandises d’Asie centrale que de Russie et de Chine (graphique 1).

Enfin, la montée de la coopération intrarégionale en Asie centrale suggère que les cinq républiques sont en train de résoudre leurs problèmes en suspens liés aux conflits frontaliers et énergétiques. Au cours des trois dernières décennies, les États d’Asie centrale ont mené une politique étrangère multivectorielle pour augmenter leurs marges de manœuvre. La coopération régionale entre les cinq États aidera davantage les Asiatiques centraux à compenser les effets des relations de pouvoir inégales avec la Russie et la Chine. D’autres acteurs régionaux et internationaux sont également intéressés par la poursuite de l’intégration économique de la région. Pour la Russie et la Chine, une région plus unifiée la rendrait plus stable, plus sûre et plus prévisible. Cela permettrait une mise en œuvre réussie d’initiatives régionales, telles que la BRI. L’Asie centrale joue également un rôle clé dans la facilitation d’un dialogue de paix en Afghanistan et son développement économique futur. Dans cette situation multiforme, il est dans l’intérêt de la Russie et de la Chine de poursuivre leur partenariat en Asie centrale et de ne pas en faire un champ de bataille d’influence.

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